À propos du livre Change ton monde.

Te souviens-tu Sylvie, lorsque tu habitais Menton, des migrants de Vintimille qui frappaient à la porte de la France et pour qui tu réceptionnais des vêtements ? Te souviens-tu, Odile, de tes nombreux passages avec ta voiture pleine de dons récoltés pour ces personnes en attente de l’autre côté de la frontière ? Te souviens-tu, Ivanna, de ce jour où, en gare de Cannes, j’ai crié ma honte d’être française en voyant la police maltraiter des migrants au pays des droits de l’homme ?

Change ton mondeJe ne savais que faire concrètement pour ces hommes, ces femmes, ces enfants qui ont traversé tant de dangers et qui ne peuvent franchir notre frontière pour suivre leur route. J’avais entendu parler de Cédric Herrou. En décembre 2016 j’avais même voté pour lui dans l’élection de l’azuréen de l’année dans le journal Nice Matin: il était un « symbole d’humanité qui incarnait la politique de la main tendue » et je viens de lire le livre qu’il a écrit, préfacé par J.M.G Le Clézio. Ce livre m’a bouleversée.

Le Clézio écrit :
« Le récit de Cédric Herrou est passionnant parce qu’il n’est pas seulement un récit. Il est au plus près de sa vie. »

En effet Cédric avait acheté un coin de terre dans la vallée de la Roya, dans l’arrière pays niçois frontalier avec l’Italie. Comme il le dit lui même :

J’ai acheté ce coin sauvage en 2002, tout défriché et retapé. Inutilisé depuis la guerre, le vaste terrain en pente était comme une jungle, la maison presque en ruine. Ici, j’ai relancé les oliviers et je soigne mes poules. Je suis heureux loin de ce monde qui m’insupporte souvent. Voilà qu’il me rattrape.
J’avais rejoint la Roya pour y vivre mes rêves de gosse sans me soucier du monde, coupé de tout dans mon refuge. J’ai croisé des exilés, et tout a changé.

Lui qui cherche à fuir le monde afin d’être tranquille est rattrapé malgré lui par ces hommes et ces femmes en souffrance et qui appellent au secours. En 2016 un soir, il va croiser une famille africaine qui marche sur la route alors qu’il revient de Vintimille et rentre chez lui. Il fait demi tour et emmène cette famille dans sa ferme. C’est le premier pas dans cette aventure qui va l’entrainer très loin.
Avec lui nous vivons les difficultés auxquelles il a été confronté, tout spécialement avec la police, la préfecture, la justice et nous en arrivons à deux événements de grande portée : grâce à l’obstination de Cédric, le Conseil constitutionnel proclame le principe de Fraternité qui autorise n’importe quel citoyen à venir en aide à un migrant en difficulté sans avoir à se soucier de son statut juridique ni à lui demander son identité.
La création d’Emmaüs Roya : 500 m2 de bâtiments désaffectés qui deviendront des locaux aux normes avec ateliers agricoles, micro-ferme ouverte au public, un espace de vente directe et deux étages d’hébergement pour une dizaine de compagnons.
J’ai été très marquée par l’importance de l’éducation que Cédric a reçue de ses parents : sa maman recevait chez elle des enfants en tant que famille d’accueil ; elle avait appris à ses propres enfants à considérer tous les autres quelles que soient leurs différences comme des frères.

Mes parents prenaient chez eux des enfants qui n’étaient pas les leurs… Ils m’ont inculqué la fraternité par le partage… Ils ont adopté un enfant trisomique, mon deuxième frère… tout le monde l’adore… la différence peut être enrichissante.

Aussi plus tard, avec un peu d’humour, dira-t-il en réponse à la question “Pourquoi avez vous fait cela” : « Si je ne l’avais pas fait je me serais fait disputer par ma mère ».

Voici quelques phrases qui m’ont beaucoup marquée :

Ma révolution a commencé le jour où ma mère m’a lancé : « Avant de vouloir changer le monde, change ton monde »

Après des années, j’ai compris ma mère et modifié mon petit monde… L’homme qui use de terreur est condamné à la terreur. Le changement réel, lui est acté par le pardon. La rancœur appartient à la révolte, le pardon à la révolution.

Ces quatre années m’ont permis de passer du « moi » au « nous », et cela change tout. Mon petit havre de paix ne m’appartient plus, j’ai laissé ma propriété au bien commun.

Toi, ma mer Méditerranée, tu prends le sale goût du sang, de la terreur, et du malheur. Tes vagues ne me bercent plus sans que je songe aux dizaines de milliers de cœurs qui s’y sont éteints. Te voilà suspectée de crimes contre l’humanité mais je défends ton innocence: tu n’es ni complice, ni coupable, juste témoin de l’indifférence.

Je vous encourage à lire et à partager ce livre autour de vous.

Change ton monde
Cédric Herrou
Éditions Les Liens qui Libèrent